Garens Jean-Louis

Religion : Faut-il parler de ses convictions au travail?

« Ce qui dérange le plus les croyants d’une religion, ce ne sont pas les croyants d’une autre, et pas même les athées, mais quelque chose de pire, les sceptiques, les tièdes ».

Dans la grande nuit des temps – Antonio Muñoz Molina

Religion, politique, football : trois sujets sur lesquels je n’aime pas discuter. À propos de la religion, je suis encore plus intransigeantSur ce point, je me demande si je suis dérangeant ou un « dérangé ». J’aurai toujours ce sourire narquois en me souvenant de ma première fois au sein de l’entreprise commerciale où je travaille actuellement. Je devais suivre une formation avant de commencer. Imaginez mon étonnement quand la formatrice nous a réuni pour la prière. Je me suis dit en moi-même : « Priez pour quoi? Pour que les ventes faramineuses le soient encore plus.»

Après quelques discussions, il fallait que quelqu’un me balance la question : « Tu es de quelle religion? » Puisqu’il faut former ou aggrandir son clan, il faut qu’on vous la pose, cette maudite question. À moi de répondre froidement : « Aucune! » Et la personne de répliquer : « Non, il faut que tu aies une religion ! Je t’invite à mon église.  » Comme si je n’avais pas assez d’entendre tous les jours un passager me sermonner durant tout le trajet à l’aller et au retour dans l’autobus.

La religion forcée n’est plus religion: il faut persuader, et non contraindre. La religion ne se commande point.

Traité sur la tolérance : à l’occasion de la mort de Jean Calas, 1763 – Voltaire

La religion et le travail : l’intérêt du patron dans tout ça?

« Si Dieu n’existait pas, il faudrait l’inventer ». Effectivement, un patron accordera plus ou moins une certaine « confiance » à une personne de telle ou telle secte religieuse espérant ainsi un minimum d’honnêteté.

D’un côté, il y a certaines sectes dites « chrétiennes » qui, on dirait, encouragent leurs membres à l’oiseveté. Si certains chefs religieux se font pourvoir par leurs fidèles, des employés sous le châle du christianisme ne sont pas exempts de toute reproche. Pour ma part, je suis attaché à la morale citoyenne qui enseigne la conscience professionnelle. J’essaie d’être toujours à l’heure, d’être honnête. Mais aussi, de ne pas « voler » le temps de mon employeur car comme on dit : « Le temps c’est de l’argent ». Là-dessus, je me demande à quel niveau le temps gaspillé affecte la productivité d’une entreprise.

Je connais des collègues qui utilisent le temps de travail pour se consacrer à l’étude de la Bible. Ben. Ça peut se comprendre puisque les activités sont au point mort durant certaines périodes de l’année.

religion
© Pixabay

Des sujets qui fâchent

S’il est vrai qu’on ne saurait cacher sa foi, si évidemment, on en a une. Toujours est-il qu’exprimer de manière trop claire ses convictions religieuses peut entraîner des tensions et créer une discorde sans fin au sein des groupes de travail.

Une entreprise est un univers restreint, où l’on est contraint de cohabiter et même de collaborer, par-delà les différences. S’il est obligatoire pour certaines confessions religieuses de convertir les « infidèles » comme aux temps des croisades, il est clair que ce qui peut être évoqué hors de l’entreprise ne peut l’être dans ses murs.

J’ai vu des groupements religieux faire d’interminables discussions sur l’espérance d’une vie après la mort, sur les préceptes moraux indiqués dans les livres sacrés, sur l’immortalité de l’âme.

En ce qui me concerne, je conseillerais de garder sa foi. Parce qu’on n’a pas su respecter la foi de l’autre, une bonne partie du monde a dû être Charlie. Cependant, le principe élémentaire se résume ainsi : « La liberté des uns prend fin là où commence la gêne des autres. » Qu’il s’agisse de liberté d’expression ou de liberté de culte, le principe est le même. L’homme aime-t-il vraiment son semblable pour se soucier de son avenir spirituel? Ou, est-ce le désir des maîtres de dominer leurs ouailles? Désormais, appelez-moi mouton noir ou vilain petit canard si c’est ce que vous pensez tout bas!


Homophobe, depuis quand l’es-tu Haïti ?

Homophobe se dit d’une personne qui éprouve, qui manifeste de l’aversion, de l’hostilité pour l’homosexualité ou envers les personnes homosexuelles. Et dire que ce terme n’a pas son équivalent en créole haïtien si ce n’est qu’une traduction intralinguale. Ça peut se comprendre puisque nous n’avons jamais été un peuple homophobe.

Je suis de la génération 90. Aussi loin que je me souvienne, Haïti n’a jamais été homophobe quand je grandissais. C’était même un spectacle public quand un masisi (gay en créole haïtien) défilait dans les rues. Entre rires et « fawouch » (plaisanteries taquines), les badauds rentraient dans la danse. Par contre, les personnes non intéressées passaient leur chemin sans y prêter attention. À l’école ou dans le voisinage, on prenait plaisir à regarder l’hommasse jouer au football et au basket-ball ou se livrer à un freestyle. Aujourd’hui, être ouvertement gay en Haïti est un « crime » passible de mort. Etre lesbienne est un « crime » punissable du viol collectif pour pouvoir goûter au plaisir d’être avec un homme.

Le mois de Juin 2017 est consacré « mois de la fierté LGBTI » aux États-Unis. À l’occasion, l’Ambassade des États-Unis d’Amérique en Haïti a exprimé ses souhaits les meilleurs au peuple haïtien. L’organisme gouvernemental a rappelé, je cite : «Selon que vous soyez lesbienne, gay, hétérosexuel, bisexuel, transsexuel ou intersexe, vous êtes d’abord et demeurez un être humain avec des droits inaliénables, dont le droit à la vie, à la liberté et celui de poursuivre vos rêves». Ce n’est qu’une affirmation ! Mais, franchement, le pari est loin d’être gagné.

Selon les chrétiens haïtiens, le tremblement de terre du 12 Janvier 2010 a sonné le glas du jugement dernier. Selon eux, le séisme relève d’un châtiment divin. « Dieu a frappé son pied, disent-ils, pour dire c’en est assez de nos péchés ». Des « prophètes » de malheur en ont même reçu le message en révélation (rêve). Plusieurs marches homophobes venant du secteur protestant ont déjà été organisées. Des appels au meurtre des homosexuels, ont été même lancés, sous le regard indifférent des policiers. Qui oserait lever le petit doigt pour dénoncer l’incitation à la violence?

Eh oui ! Légaliser le Mariage Pour Tous en Haïti reviendrait à augmenter nos maux (famine, chômage, misère), selon les protestataires qui ont même évoqué Sodome et Gomorrhe.

À noter que toute cette homophobie a su asseoir le capital politique de l’actuel Sénateur de la République, Jean Rénel Sénatus, qui a participé aux marches en 2013 et qui porté haut la main les sénatoriales dès le premier tour en 2015. Le festival Masimadi, qui devait lancer le débat, n’a pas lieu. Entre-temps, la seule association de défense des droits LGBT de l’île, Kouraj continue d’œuvrer pour les droits de la communauté.

Aux nouvelles de cette semaine, le sénateur Jean Renel Sénatus a boudé une réunion de débat qu’organisait une coalition d’organisation de défense des droits humains dont Kouraj. Le parlementaire a quitté la salle où se tenait la rencontre après avoir remarqué la présence d’un rassemblement d’organisations qui se donnent pour mission de légaliser la vie homosexuelle en Haïti. Le sénateur a donc vidé les lieux : « Les homosexuels n’ont-ils pas des droits ? « Oui. Mais cependant, je sais que ma constitution, l’article 16 de la déclaration universelle des droits humains, le Code Civil dit que c’est une femme et un homme qui peuvent se marier et fonder un foyer ».

Le droit à la différence

Être un élément mâle dans la famille haïtienne représente beaucoup. Je vais vous faire plusieurs aveux. Dans les familles paysannes, si une femme accouche d’un garçon, on lui donnera à manger d’un cabri. Tout ça, pour vous dire, l’importance que revêt le garçon dans l’avenir de la famille.

Un parent haïtien qui a un enfant homosexuel considérera que c’est un « lajan pèdi » (un investissement gâché). Non seulement il risque de ne pas voir la pérennité de la lignée mais aussi l’enfant sera perçu comme un handicap social. Il y a tellement de stéréotypes autour des homosexuels en Haïti. Un homme trop efféminé attirera l’ostracisme. J’ai même découvert un terme dans le jargon homosexuel haïtien pour qualifier les drag queens ou les hommes trop efféminés : « dereyal ».

J’ai entendu toutes sortes de commentaires à l’annonce de Masimadi. Des parents craignaient que leurs fils ne soient corrompus contre de l’argent, qu’ils se fassent draguer par des mecs. Vous ne verrez jamais un couple hétéro haïtien s’embrasser (même pendant une cérémonie de noces, c’est le fou rire). Approuver une telle loi, c’est donner libre champ à la luxure.

En ce qui me concerne, je ne pense pas que les homosexuels haïtiens arrangeraient leurs situations si une telle loi arriverait à passer même dans 25 ans. Car, notre seuil à l’homo-tolérance restera le même. Dans un pays où journalistes engagés, militants politiques se font assassiner sans que justice soit rendue. Je vous garantis que chaque jour le nombre de victimes et de meurtres se feraient enregistrer dans un pays où la pratique du lynchage est de mise.


Port-au-Prince : la ville-fourmilière

Fondée le 13 juin 1749 par les colons français, au Bel-air, Port-au-Prince devait accueillir au départ 200 000 habitants. Aujourd’hui, la ville en compte 3 millions. À la fois capitale politique et économique du pays, la commune la plus peuplée d’Haïti constitue en quelque sorte un eldorado compte tenu de la centralisation. Par conséquent, vivre à Port-au-Prince génère du stress, marcher dans ses rues engendre une certaine frustration.

Port-au-Prince
Crédit photo : lakayanm

Autrefois, c’était d’une grande fierté pour le citadin de se déclarer Port-au-Princien. La capitale était en quelque sorte notre « Ville lumière ». Ce sont surtout le goût pour les choses de l’esprit et l’éclairage à l’électricité dans toute la ville qui lui ont valu cette considération. Un campagnard qui n’a jamais mis les pieds dans la ville ou qui ne connaît pas ses recoins sera considéré comme quelqu’un qui n’est pas « éclairé ». Cependant, le train de vie à Port-au-Prince est tellement intense que l’humble personnage qu’est le paysan se trouvera comme le rat des champs dans la célèbre fable de La Fontaine.

Port-au-Prince, une ville pressée

Port-au-Prince
Crédit photo : Lionel Bernard

Nombreux sont ceux qui rejoignent la ville dès cinq heures du matin : commerçants, écoliers, travailleurs. La Grand’Rue constitue l’artère principale qui mène au cœur des activités quotidiennes de la capitale. Véritable grenier du pays, on y trouve les principaux marchés servant de lieux d’approvisionnement pour toute la zone métropolitaine. Il suffit de s’y rendre pour prendre le pouls de la vie économique. Si vous aimez discuter de meilleurs prix ou tomber sur la bonne occasion, le rendez-vous vous est donné ! Les rues sont souvent bondées de monde. Entre badauds et « brasseurs de la ville », il faut vous frayer un chemin. Partout, les trottoirs sont occupés par un petit commerce de détail : des vêtements ou des livres d’occasion, des produits de première nécessité, une station de motocyclettes.

Si vous ne n’avez bousculé personne en marchant, c’est que vous n’avez jamais investi les rues de Port-au-Prince. Désolé, vous risquez de ne pas recevoir d’excuses. Et ça, tout le monde le sait. «Pòtoprens se yon peyi kouri li ye».

Port-au-Prince, une ville imprévisible

Chacun essaie de créer son propre espace dans la foule pour ne pas risquer de se faire « fouiller » (subir un pickpocket) ou « freezé » (subir un hold-up), car cela peut arriver à n’importe quel moment, sous le regard impuissant des passants. On préfère parfois marcher sur le pavé au risque de se faire heurter par une motocyclette. Entre bruit, agitation et parfois bousculades, je me demande ce qui est le plus oppressant !

Si vous êtes nonchalant, vous risquez de ne pas remporter cette course contre la montre. Quand le temps est à la pluie, c’est le rush à Port-au-Prince. Quand j’étais gamin, on chantait pour qu’il pleuve, se baigner sous la pluie est l’un de mes plus beaux souvenirs d’enfance. Mais désormais, on prie pour qu’il ne pleuve pas trop, du moins, pour ne pas se retrouver sous la pluie, en pleine rue. Ici, la pluie, c’est le monstre.

Port-au-Prince
Crédit Photo : Valérie Baeriswyl

Aussi, si vous devez vous rendre à l’heure quelque part, prévoyez-le deux heures à l’avance. Mieux vaut arriver une demi-heure plus tôt que d’avoir à courir.

Tout est cause d’embouteillage : un chauffeur qui stationne ou qui tourne mal, une voiture délabrée qui tombe en panne en pleine rue, le service de voirie qui essaie de déblayer ou pire un accident. Autre motif,  une bande de rara ou deux « kokorat » (voyous) qui se battent. Sans parler du fait que les routes sont garnies de nombreux nids de poule.

De la rue Saint-Martin en passant par Sans-Fil, Canapé Vert, Bourdon, Turgeau Pacot, Poste-Marchand, Nazon, Bois-Verna et la « célébrissime » Martissant : toutes ces ramifications de Port-au-Prince sont des lieux réputés pour leur « blocus » (bouchon).

Port-au-Prince a-t-elle raté sa voie?

Après le tremblement de terre meurtrier du 12 janvier 2010, on a pensé que Port-au-Prince allait devenir une capitale digne de ce nom.

Port-au-Prince
Crédit Photo : Marcia Cris Goes Pimpao

Sept ans après le tremblement de terre, on voit toujours des bâtiments endommagés en plein centre-ville sous lesquels des commerçantes viennent chaque jour étaler leurs marchandises. Novembre 2016, une ancienne usine de production de boisson gazeuse, désaffectée depuis des années et fortement endommagée par le séisme de janvier 2010 s’est partiellement effondrée faisant huit victimes. Où en sommes-nous dans la campagne de démolition dans la capitale?

Certains se souviennent de la visite d’agents municipaux chez eux après le séisme. Les maisons en bon état étaient marquées au vert, celles qui méritaient une réparation en jaune et celles qui méritaient d’être démolies en rouge. Quel suivi ?

Me Jean-Henry Céant, notaire public, travaillait pour le traitement de dossiers de l’expropriation au bas de la ville, où 200 hectares ont été déclarés d’utilité publique (sous le gouvernement de René Préval après le séisme de janvier 2010). Dans le cadre du projet de construction de la cité administrative, des expropriations étaient réalisées sur la base de déclaration d’utilité pour la construction de la dite cité. Quelques années plus tard, l’ancien candidat à la présidence, Jean Henry Céant, a été la proie d’intox comme étant l’artisan de la campagne « Kraze Kay » (démolitions de maisons). Certains propriétaires ont été indemnisés, d’autres non. Me Céant a eu l’élégance de remettre officiellement « ses honoraires » aux victimes du dossier d’expropriation au centre-ville. Qui osera s’attaquer à tout le travail qu’il reste à faire ?

Peut-on rêver d’une Port-au-Prince propre?

Je n’étais pas censé parler du problème d’assainissement et d’insalubrité de la ville. Mais, comment ne pas en parler? Pour marcher dans quelques rues, je dois parfois me tremper les pieds dans quelques eaux immondes et esquiver des monticules de déchets. Bref, je n’accuse personne sans pour autant déresponsabiliser les autorités. Tout cela donne haut-le-cœur pas exactement à cause des relents. Ce n’est pas facile de garder une ville propre à fond quand on dispose de seulement trois véhicules et d’un camion compressif pour le ramassage des ordures.

Il faut tout de même reconnaître la volonté du maire, Youri Chevry, de changer l’image de la capitale. Des travaux d’assainissement ont été effectués par la Mairie de Port-au-Prince au Boulevard Harry Truman (La Saline). Le projet d’identification des rues de la Capitale a été lancé et exécuté. Un processus de restructuration a été lancé au sein de l’administration communale qui s’était retrouvée en faillite.

Sécurité, revitalisation de la commune de Port-au-Prince et développement économique sont trois des axes fondamentaux de la politique générale du Conseil municipal de Port-au-Prince.

Aujourd’hui marque 268 années d’histoire de la ville de Port-au-Prince. Puisse le premier citoyen de la ville, mandaté jusqu’en 2020, écrire un nouveau chapitre dans la grande histoire de notre chère ville…

Pour ma part, je profite de cette occasion pour présenter mes vœux à la ville. Notamment, je souhaite qu’il y ait une police municipale. D’une part, pour démanteler les « chèf mache » (chefs de gangs) qui rançonnent tous les jours les « ti machann » (petits commerçants). D’autre part, pour aider à reprendre le contrôle de la ville. Les quelques policiers du Portail Saint-Joseph ne peuvent pas s’adonner à ce travail colossal.

Ma ville, mon image

On aura beau se servir de programmes, de spots télévisés, de campagne de sensibilisation et de slogans comme « Bale Lari », « M’ap bale », « Katye Pa’M pwòp ». Tant que le problème n’est pas résolu en amont, se perpétuera ce que j’appelle « le cycle du fatra ». À noter que ces campagnes de sensibilisation ne sont pas tout à fait vaines car certains quartiers reflètent un certain niveau de propreté grâce à la bonne collaboration de leurs résidents.

Des personnalités de la mode participant à la campagne "M'ap bale" de la SMCRS
© Manuell Photography

Tout le monde se plaint de l’état de la ville. Très peu d’entre nous s’engage à la garder propre. Va dire à quelqu’un de ne pas jeter son sachet ou son bidon en plastique dans la rue. Il te répondra : « Ki kote pou m’ lage l? (Où dois-je le jeter?) »

Notre rapport avec les déchets est un peu spécial. Autrefois, les camionnettes étaient équipées d’une poubelle. Sans doute, parce que des passagers mal intentionnés partent avec, fini les boîtes à ordures dans les tap-taps. Quant aux bennes à ordures, elles ont presque disparu dans les rues. Au moins, même si elles se renversaient, la populace pourrait y jeter ses détritus au lieu de les jeter dans les rues après une pluie quelconque.

Peut-être que je suis trop idéaliste mais je fais partie de cette minorité qui croit que le changement est encore possible. Possible dans la mesure où il y aura une volonté politique forte jusqu’à prendre des décisions impopulaires. Il suffit d’éveiller la conscience citoyenne. Parfois, quand je vois déferler les gens, j’ai l’impression de voir des « zombis » tellement qu’ils sont obnubilés dans le confort de la fétidité. Nous qui sommes de la génération consciente. Agissons comme instigateurs de la révolution mentale haïtienne. Non seulement une autre Haïti est possible mais aussi une autre Port-au-Prince est possible…


Amour, quand tu me prends !

« L’amour est un «je-ne-sais-quoi» qui vient de «je-ne-sais-où» et qui finit «je-ne-sais-comment». » 

Madeleine de Scudéry

En ce qui me concerne, c’est la parfaite définition de l’amour. Il a fallu que cette femme qui a vécu au Siècle de la Raison le dise. Franchement, c’est quoi l’amour? Un sentiment, une émotion, un acte. C’est un peu de tout ça ! Bref. Le temps d’un regard échangé, d’une étreinte, d’un mirage. Et hop ! On se dit amoureux. Comme si la vie était un film de Disney Land, pour trouver le grand Amour, il faut que cela dure pour la vie ! Par les temps qui courent, si je considère le dernier point, le grand Amour est difficile à trouver…

Pour vous faire un aveu, ma dernière relation amoureuse remonte à 2014. Après cinq années de relation tourmentée, mais non dépourvue de passion, j’ai fini par jeter l’éponge par épuisement. Entre déchirure et cicatrice, je pourrais dire que c’est mon grand Amour. Bizarre hein ! Le genre de fille qui t’aime pour ce que tu es vraiment, qui est prête à te remonter le moral, qui te dit : « Ben. On va surmonter ça ensemble. »

Amour
© Cromaconceptovisual

Cette fille est mon seul regret. Le genre de meuf qui se fait draguer par une meute en chaleur et qui pourtant n’a rien à cirer. En effet, je suis fier d’avoir conquis une fille aussi sûre d’elle ! C’était la soeur d’un pote. Elle feignait ne pas s’intéresser à moi et tout en se montrant gentille à mon égard. Quand je perdais espoir et voulais passer à autre chose, elle s’est décidée.

Une relation vivable mais pas facile. Moi autoritaire, indépendant et insouciant, elle insoumise, jalouse et possessive. Nos personnalités se choquaient. Nous nous sommes amusés à nous faire mal mutuellement, mais nos réconciliations et nos pardons étaient particulièrement intenses et émouvants. Les gens dans notre entourage s’étaient habitués à nous. Pour notre rupture définitive, ils ont cru en une possible réconciliation. Et ça, il a fallu que je m’éloigne d’elle pour éviter l’effet boomerang de notre relation. Trève de plaisanterie, on s’est rencontrés deux ans après à un mariage d’un ami commun, on a dansé sous le regard choqué de plus d’un. À nos jeux sadiques, on est les amoureux maudits. Comme on dit dans mon pays,«moun damou pa kite» . (Les vrais amoureux ne se quittent pas)

Et si le grand Amour était notre plus grande histoire d’amour? L’aventure qu’on ne saurait oublier même au fil du temps dans les bras d’un autre. L’idylle qui nous reste sous la peau. Peut-être le premier amour ! Celui qui vous a tout appris ou celle qui vous a tout donné. Quoiqu’il en soit, il n’appartient pas à tout le monde de trouver le grand Amour au cours d’une vie. À moins d’avoir accompli son karma (pour ceux qui y croient) ! Par exemple, je pense aux enfants qu’on marie au Bénin !

Amour rime-t-il avec sexe?

Peut-être que vous aussi qui me lisez, vous avez fait de grands yeux en disant : «Ça alors? Il faut quand même passer à autre chose ! Depuis tout ce temps, il ne s’est pas vidé les balloches » Rires. Malheureusement, vous n’aurez pas les réponses dans le billet.

Indirectement, je supporte ce que genre de réflexion de mes proches. Quand j’appelle ma mère pour prendre de ses nouvelles, elle me demande toujours si j’ai eu une nouvelle copine. Lorsque je lui réponds que non. Elle me réplique : « Fi sa a te pran bann ou ». (Cette fille – celle en question – a pris ta puissance érectile). Maman croit que je fais le cachottier. Mais, on ne va pas expliquer à sa mère le concept de « sexfriend » quand même. Rires.

Effectivement, j’y ai songé. Ce n’est pas comme si je faisais mon « veuvage ». J’ai tenté quelques rencontres. Sauf que jusqu’à présent, ça n’a pas marché. Soit qu’elles n’ont pas vraiment le profil, soit que je mets la barre trop haut. Quand tu es à la fois esthète et sapiosexuel, c’est un peu difficile de trouver la perle rare.

Parfois, j’ai l’impression que mes amis me prennent en pitié. Ils me reprochent de ne pas sortir assez. Quand je rencontre des anciennes connaissances, la première question qu’elles me posent : «Ou gen mennaj kounya? » (Tu as maintenant une copine?). Dans leurs têtes échevelées, elles se demandent comment je fais pour gérer toute cette surproduction de testostérones.

À l’évidence, ce que les gens ne comprennent pas c’est qu’on peut partager son corps mais pas son coeur. Pour moi, l’amour est un lien spirituel qui unit deux personnes.

Amour, aime-moi !

Oh combien j’aime cette expression idiomatique dans la langue française « âme soeur ». Trouver quelqu’un avec qui partager ses pensées, ses espérances, ses craintes, ses projets, ses habitudes et même ses talents et capacités, ce n’est pas juste un rapport d’humeurs.

Ceux de ma génération sont éperdument désespérés dans leur quête d’amour. Les applications de rencontres pullulent sur le Net. Hansel et Gretel sont au chômage car les cartomanciens et tarologues ont envahi la toile.

Bien sûr que je cherche l’amour. Mais, j’ai tout de même le bonheur dans la peau. Pour citer Rémy de Gourmont, «l’homme commence par aimer l’amour et finit par aimer la femme, la femme commence par aimer un homme et finit par aimer l’amour. » Alors, Amour, aime-moi !


Real Madrid : La DuoDecima, ça se gagne !

Fondé en 1902, le Real Madrid est le club le plus prestigieux du monde. Avec trente-trois titres de champion national et vingt titres de championnat européen, le Real Madrid n’en finit pas avec ses records. Gagnée deux fois de suite par la même équipe, cette finale de Ligue des Champions du samedi 3 juin 2017 a été exceptionnelle…

En plus des 74.000 personnes présentes au Principality Stadium de Cardiff, nous étions plus de 200 millions de personnes à avoir suivi à distance ce match tant attendu. Radio en main, assis devant un téléviseur, il ne fallait pas manquer cet événement planétaire pour rien au monde. Ne me demandez pas pourquoi je suis « Madridista ». Si le soccer est un sport « universel » , les joueurs du Real Madrid sont tout simplement des « suprahumains ». La qualité des passes, le sprint, cette habileté à recevoir des ballons à n’importe quelle distance, enfin woaw.

Real Madrid
CC : William Brawley

Je devais assister à un séminaire de formation dans le cadre de mon travail depuis plusieurs samedis. Et le samedi 3 juin, c’était la dernière séance. Donc, il ne fallait pas que je la rate. Tout comme il ne fallait pas que je rate cette finale. Le match était prévu à 14h 45 (heure locale).

Le match avait déjà commencé quand j’ai appelé pour savoir s’il y avait de l’électricité en rentrant. Quand il y a une grande affiche sportive, c’est toujours le black-out généralisé. Il faut que des chroniqueurs sportifs interpellent l’EDH (Électricité D’Haïti) depuis leurs micros. Bizarrement, il arrive, une fois le match terminé, que l’on relance l’électricité. Enfin bref, je n’aime pas écouter les matchs à la radio. Il fallait que je regarde celui-là sur un Inverter. Le match était 1 à 1 quand j’ai commencé à le regarder à quelques dizaines de minutes de la fin de la première mi-temps.

Deux buts en trois minutes

Pour ce match, personne ne va pas accuser l’arbitrage. À part le fait que l’arbitre central s’est fait piégé sur le clash entre Ramos et Cuadrado. Néanmoins, ce fut un match très ouvert. La volonté de vaincre des deux côtés a occasionné certaines interventions très viriles, des tacles rageurs. J’ai vu un Isco à 200% (et ce, depuis un certain temps) qui a offert du beau spectacle. Un Dani Alves, plus que déterminé, qui était sur le qui-vive. Ça, tout le monde peut le comprendre. On est « blaugrana » ou madrilène pour la vie !

Quel coup de patte de Casemiro aux 30 mètres, sur une frappe déviée par Khedira, trompant le légendaire Gianluigi Buffon ! En moins de deux, Cristiano Ronaldo allait doubler la mise grâce à un débordement de Lukita faisant de lui le meilleur buteur de la Ligue des Champions pour la 5ème saison consécutive (12 réalisations).

Zidane a réalisé un coaching payant. Remplacé par Asensio, Isco a laissé le terrain sous les ovations bien méritées du public madrilène. On menait déjà par 3 buts à 1 quand le talentueux Asensio foulait la pelouse. Il aurait fallu de quelques minutes pour que Marco frappe d’un coup de massue les Bianconeri, au comble du désespoir.

  • Résumé de la finale de la Champions League 2017 en vidéo :

Zidane parmi les grands entraîneurs du Real Madrid

Depuis son arrivée en équipe d’élite, le 4 janvier 2016, Zidane ne cesse de multiplier les records : 40 matches officiels sans défaite, une Coupe d’Europe, une Super coupe d’Europe et un Mondial des Clubs. Même si les grands joueurs ne font pas toujours de grands entraîneurs, j’ai toujours cru qu’il en serait ainsi tout bonnement parce qu’il est une légende vivante du football.

Nouveau Record ! Zidane est le premier entraîneur à conserver son titre en C1 vingt-sept ans après Arigo Sacchi du Milan AC (1989-1990).

Soit dit en passant que Zidane remporte au passage la Ligue des Champions en même temps que la Liga. Il faut aussi noter qu’à ce jour Zinédine Zidane devient le quatrième entraîneur le plus titré de l’histoire du Real Madrid derrière Vicente Del Bosque, Luis Molowny, Miguel Muñoz.

Il a été très respectueux vis-à-vis de « l’adversaire ». Ben. La Juve, c’est aussi une partie de lui.

Cristiano Ronaldo, ballon d’or?

Florentino Pérez : « Nous avons écrit l’histoire. Personne ne mérite plus le Ballon d’Or cette année que Cristiano Ronaldo. »

En ce qui me concerne, il le mérite. Il a mené à lui tout seul le Real Madrid jusqu’à la DuoDecima depuis les 1/4 de finale face au Bayern. Il a marqué 5 buts contre le Bayern, 3 en demi-finale contre l’Atlético et un doublé en finale. Sans parler du fait que le Real Madrid a remporté son 33ème Liga cette année. Tout compte fait, il n’est que d’attendre.

 


Ayiiti : Une Haïtienne dans l’âme

Ayiiti ! À première vue, elle est de loin l’allégorie d’Haïti. En particulier, Haïti est souvent représentée par une femme noire en détresse, déchirée dans ses entrailles par les souffrances de ses fils. Pourtant, elle porte le nom de la mère-patrie comme vrai prénom, Ayiti.

Ayiiti
Instagram : Ayiiti

J’ai découvert cette artiste à la crinière frisée et à la peau blanche grâce à sa chanson vidéoclipée « Voodoo You Do ». J’ai trouvé le titre intéressant. Puisque la chanson est en partie en anglais, je m’étais dit : « En voilà une qui s’intéresse à la culture de chez nous». En l’entendant dire : « Ou mache nan san m » (je t’ai dans la peau, tu m’envoûtes), je me suis dit : « Ben. Elle parle ma langue». Vous savez ! Dès qu’on dit : « vaudou » chez nous, on a souvent tendance à associer cela au « diable » (au maléfisme). Vu cette culture judéo-chrétienne qui nous est imprégnée, « Voodoo You Do » est un peu étiquettée jusque-là. Il a fallu la sortie de « Zeptima » et sa participation dans le projet musical « Drapo m’ Nan » (Mon drapeau) pour susciter mon grand intérêt pour cette artiste.

Ayiiti, Haïtienne ou pas?

Il y a de cela quelques mois, s’est soulevée une polémique autour de Raquel Pélissier, la première dauphine Miss Universe 2016. Aux yeux de certains, elle ne représentait pas vraiment la femme haïtienne.

En ce qui me concerne, j’ai essayé d’attribuer une cause plausible à toute cette polémique. Était-ce de l’ethnocentrisme ou les idéaux afro-féministes mal conçus?

Du coup, je me suis rappelé, contrairement à certains, qu’être un Haïtien authentique ne signifie pas forcément avoir la peau foncée. Me diriez-vous que les habitants de Casale (Cabaret, Ouest, Haïti) ne sont pas Haïtiens parce qu’ils sont en grande partie descendants de Polonais? Ou encore, ceux de Fonds-des-Blancs n’ont-ils pas le droit du sol? Dans notre réalité sociale, tout homme à la peau claire et même basanée ou albinos, recevra le sobriquet de « blan » (Blanc). En revanche, on peut être Haïtien d’origine et ne pas se considérer comme tel. Bref, tout est une question d’haïtianité.

Effectivement, en plus d’être animée par ce sentiment fort, Ayiiti, de son vrai nom, Ayiti Coles est Haïtienne. Née d’un père franco-haïtien et d’une mère chilienne, elle est 100% Française, 100% Haïtienne, 100% Chilienne. Cependant, où qu’elle aille, elle fera flotter le drapeau haïtien et se dit fière d’être Haïtienne. « Drapo m’ se tankou cheve mwen, mèt ba l’ koulè mwen vle vrè koulè l’ pap chanje. Ble e wouj la se fyète mwen. Mèt fè sa’w vle l’ap rete kole anba po mwen » 💙.

Ayiiti soulevant fièrement le drapeau haïtien
© Instagram : Ayiiti

De surcroît, on dirait qu’elle veut garder en vie une frange de la culture haïtienne qui tend à disparaître. Les textes de ses chansons en témoignent de ce constat.

Zeptima

Nos jeux d’enfant comme le cache-cache, le saut à la corde et la marelle sont de moins en moins pratiqués par les enfants de cette génération. On a une jeunesse « digitalisée », jamais sans ses écouteurs, à l’affût de musique d’ambiance. Et ça, on dirait que Ayiiti l’a bien compris, celle qui est née à Paris et a grandi à Haïti. Elle a réuni quelques bribes de nos chants traditionnels d’enfance sur un fond d’afro-beat pour nous livrer « Zeptima ».

  • Voici la vidéo complète (paroles et musique) de la chanson :

L’artiste compte déjà deux albums à son actif, « Shizo » (2012) et « No Heartbreak » (2014). Elle prévoit un extended play (EP). Néanmoins, son rêve est de devenir une star internationale. Notamment, elle a tout pour atteindre son but. Elle chante en anglais, la langue la plus courante de l’industrie musicale. Aussi, elle explore le pop-rock, l’electro et l’alternative.


Hypocrisie : un visage et un nom

« On ne fonde rien de valable sur l’hypocrisie et le mensonge ». 

(Paulette Poujol-Oriol).

A priori, nous sommes tous hypocrites à un moment donné et pour une quelconque raison. À vrai dire, l’hypocrisie est plus qu’un défaut mais une réalité humaine qui a existé dans toutes les sociétés et les époques. Sans conteste, l’hypocrisie sociale affecte les relations humaines.

Entre conventions et malaise

Nous sommes tous confrontés au jeu de rôles, et ça il faut le faire. Être notamment un bon voisin, un employeur apprécié, un employé respectueux, un élève poli, tout dépend de la scène.

Sincèrement, qui n’a jamais envie de passer sa route un bon matin sans se soucier du monde autour? Stop ! La politesse exige en revanche que l’on salue et que l’on dise au revoir. Se serrer la main ou passer le bonjour. Peu importe, du moment que c’est fait. Et si vous êtes Français, il faut faire la bise. Et puisqu’entre filles, il faut impérativement s’embrasser, j’aimerais pouvoir rentrer dans la tête d’une dame qui doit embrasser plus de cinq joues.

« Comment vas-tu? », cette question qu’on peut vous poser à longueur de journée ou plusieurs fois pendant une conversation téléphonique. Ça fait plaisir que les gens semblent se soucier de notre bien-être personnel. Je ne sais pas si c’est moi qui suis simplement impassible ou s’il vous arrive de trouver cette question un peu horripilante. Et de répondre que ça va avec une sourire pour ne pas avoir à donner trop d’explications. Ainsi, notre hypocrisie sociale consiste à s’abstenir de répondre sincèrement à la question.

hypocrisie
© Pixabay

L’hypocrisie, l’art d’être aliéné?

Si vous me demandez quels sont les gens que j’ai en aversion, je vous répondrai : les beaux-parleurs, les hypocrites et les menteurs. En ce qui me concerne, je suis quelqu’un de direct, d’impulsif, de fougueux. Même là, je me retrouve être un tantinet hypocrite. Comment dire à cette personne qui s’adresse à nous qu’il pue des aisselles ou que son haleine empeste l’air? Je ne saurais le lui dire. Ou encore, comment dire à une petite amie trop « collante » de nous lâcher un peu les baskets? Oups ! Elle risque de m’accuser d’avoir quelqu’un d’autre. Vais-je finir par craquer sous le poids de cet « amour »? Qui sait ! Comment dire à sa mère qu’on a le ras-le-bol de ses critiques incessantes sur nos actes manqués? Non ! On l’aime trop pour le lui dire !

hypocrisie
© Pixabay

On dit qu’un ami, c’est quelqu’un qui peut écouter la même histoire une deuxième fois comme si c’était la première. On dit aussi qu’un ami c’est quelqu’un qui sait vous protéger des illusions pour faire face à la réalité sans vous détruire. Sur ce point, il faut vraiment être aimable ou ami avec quelqu’un pour le faire. Parfois, certaines personnes se croient en présence d’une oreille attentive et se mettent à raconter leurs problèmes. Sans le savoir, cette « oreille attentive » en a assez de vous. Qui oserait dire à quelqu’un que sa tenue ne lui va pas ou que cette personne dont il est épris n’est pas fait pour lui?

Mon lieu de travail, un cercle vicieux !

« L’hypocrisie est un vice à la mode, et tous les vices à la mode passent pour vertus. » Molière, Dom Juan (1665)

Si être hypocrite c’est jouer un personnage autre que le nôtre, je suis tous les jours spectateur de scènes les plus pitoyables que les autres.

Un tel se fait saluer avec le plus large sourire tandisqu’à l’instant on parlait sur son dos. Et pourquoi donc? Un tel est un retardataire chronique.

En réalité, tout le monde cherche à se valoriser moralement, à gérer son image sociale. Tout compte fait, il faut se montrer loyal, honnête et amical.

Voyez la tête du patron qui est obligé de dire un bonjour mécanique à son petit personnel puisque celui-ci est déjà sur place.

Voyez la tête des employés tenus d’appeller « Monsieur » ou « Madame » un (e) supérieur (e) hiérarchique alors qu’au fond on se moque bien de sa gueule.

En définitive, l’hypocrisie sociale a gagné une grande partie de la société. À cet égard, on dirait qu’elle est inhérente à l’homme. Peut-on bannir une partie de soi? Impossible ! Cependant, si on devait dire réellement et pleinement le fond de sa pensée, notre monde aurait plus de conflits. C’est ma façon d’admettre que l’hypocrisie sociale favorise effectivement une certaine paix sociale.


Rabòday, un style musical consternant?

Rabòday (prononcée «ra-bo-da-ye»), un genre musical qui devient partie intégrante de la playlist de musique d’ambiance en soirée. Vous ne passerez pas une journée à Port-au-Prince et dans ses environs sans que vos oreilles ne soient titillés par les rythmes du rabòday. Pourtant, ce style musical est considéré comme un danger pour la société haïtienne…

Le rabòday est un style musical né à quelques lustres des années 2000. C’est un mélange de rara et d’autres rythmes traditionnels d’Haïti avec le house music.

Tony Mix et Vag Lavi, deux noms très connus par les amateurs de rabòday. Tony Mix est d’ailleurs le premier DJ spécialisé dans ce style musical de sorte qu’il devient une référence dans le domaine. Cette tendance musicale, considérée comme un afro local, possède ses propres beats et ses rythmes spécifiques.

Les refrains, les slogans, les chansons de Tony Mix, de Vag Lavi, de NG Mix, sont presque sur toutes les lèvres. Très plébiscité, ce style musical séduit les couches populaires. Un son qui résonne dans les hauts-parleurs des tap-tap, des motocyclettes et à l’occasion des journées récréatives.

Pour danser le rabòday, il suffit de sentir la musique et de twerker. Le rabòday suscite les déchaînements des moralistes qui qualifient les amateurs de ce rythme nouveau de génération pourrie. Mais encore, entre ces deux générations, il y a ceux qui ne sont pas de la vieille école mais qui s’estiment trop formés pour se laisser entraîner dans cette « dépravation« .

  • Vidéoclip (musique et paroles) de Tony Mix pour avoir une idée du style musical

Je vous invite sans plus tarder à voir la vidéo complète de son clip :

Le rabòday et ses sujets qui fâchent

Les artistes rabòday font le choix conscient d’écrire des chansons qui abordent des sujets tabous. La femme est sujet d’actualité dans la plupart des textes. Il y a ceux qui trouvent les paroles de ces chansons carrément dénuées de sens, d’autres les trouvent trop crus.

Qu’en est-il exactement? Les avis sont partagés sur la question et c’est compréhensible. Les féministes et pro-féministes se sentent indignés par l’image de la femme dépeinte à travers ces chansons dans lesquelles les femmes haïtiennes sont dévalorisées, abaissées et peu appréciées, selon leurs nobles avis. Au fond, toutes les femmes ne sont pas visées. D’abord, celles qui pratiquent le commérage et l’infidélité. Ensuite, celles qui se blanchissent la peau. Enfin, celles qui favorisent la beauté physique au détriment de la connaissance intellectuelle. Pour toutes ces raisons, le rabòday est considéré comme un danger pour la société haïtienne.

Cerise sur le gâteau, Tony Mix a été nommé ambassadeur culturel de Carrefour en juillet dernier par le nouveau maire fraîchement installé. Il ne manquait que ça. Les « intellectuels » du pays sont montés au créneau pour élever la voix contre un prix décerné pour encourager l’obscénité et la « médiocrité ». Ils ont déposé environ 1500 signatures sur petitions24.net ! On s’accrochait à son dictionnaire pour mieux comprendre la définition du mot « culture ».

On dit souvent que la musique c’est l’identité culturelle d’une société. Tellement de questionnements ont agité les esprits sur le fonctionnement de la société, le rôle important des parents dans l’éducation familiale. Tout le monde cherche à qui la faute.

Si l’on se réfère au quotidien haïtien et à notre culture du tabou, on peut comprendre la construction de la réalité sociale dénoncée et toute la polémique suscitée par cette nomi.


Haïti : la Fête du Drapeau vue autrement

Haïti, la Première République noire du monde, la Perle des Antilles. Haïti, le pays le plus pauvre de l’Amérique. Ce 18 Mai a marqué la 214 ème année du bicolore national. Pourtant, je suis resté de marbre. Dans ma caboche, j’introspècte ce qu’être Haïtien veut dire pour certains de mes compatriotes. Tout rêveur, je me demande s’il sera un jour possible de redorer notre blason.

Auriez-vous envie de visiter Haïti un jour? Si vous passez chez nous, vous rencontrerez un peuple généreux, jovial, xénophile, croyant jusqu’à être naïf. Un peuple fier malgré ses déboires et ses malheurs.

Le déficit d’image positive que connaît le pays à l’étranger pousse certains binationaux à s’approprier la nationalité de leur terre d’accueil. Du reste, les Haïtiens de condition modeste vivant au pays s’enquérissent sur la manière d’obtenir une nationalité étrangère. Être Haïtien ne fait pas de nous un citoyen du monde, mais une paria.

On ne choisit pas son sexe, sa couleur de peau et sa nationalité. Tout ceci constitue le profil sociologique de l’individu. Si c’était le cas, très peu de gens auraient choisi d’être Haïtien, à mon avis. Si seulement on réfléchissait vraiment sur les paroles de la Dessalinienne (hymne national), on aurait compris qu’on a piétiné les valeurs nationales…

Haïti, une nation libre?

Le 18 Mai 1803, les nègres de Saint-Domingue ont symbolisé leur révolte en arrachant le blanc du tricolore français. Catherine Flon cousit les deux bandes bleue et rouge à l’horizontale. Symbole d’un désir de renversement qui sera rendu effectif avec la bataille de Vertières.
Haïti
© Photo crédit : Pixabay

Du sol soyons seuls maîtres

Marchons unis, marchons unis

En fait, il n’a jamais été question d’autonomie réelle. À propos du sol, nous n’en avons jamais été son seul maître. Suivant la doctrine de Monroe, nous sommes condamnés à subir l’ingérence américaine. D’ailleurs, l’occupation américaine (1915-1934) en témoigne. Ainsi, même après cet affront, ils continuent de nous dicter quoi faire. Comme on dit, qui finance commande. Pas seulement eux-même, mais toute la dite communauté internationale (ONU) auprès de laquelle nous quémandons.

Haïti
© Pixabay

Après plus d’une décennie sur la terre de Dessalines, on a annoncé le départ de la MINUSTAH. Comme partout ailleurs, mission accomplie. Ils ont violé et filmé nos fils, mis en cloque nos sœurs et se sont faits un peu de fric. Enfin bref, la MINUSTAH sera remplacée par la MINUJUSTH. Cette nouvelle force non-militaire dénommée Mission des Nations Unies pour l’appui à la justice en Haïti sera composée de sept unités de police.

La prochaine fois qu’on aura besoin d’arrêter un sénateur élu pour trafic de stupéfiants on n’aura pas besoin de l’extrader. Fini les palabres et les discours pseudo-nationalistes.

Haïti, un peuple uni?

Marchons unis, marchons unis

Pour le Pays, pour les Ancêtres

Marchons, marchons, marchons unis

Pour le Pays, pour les Ancêtres

Voilà quelques paroles de l’hymne national. Cette unité était le ciment de cette révolution tant glorieuse que nous continuerons de payer le prix.

Vous comprendrez bien cela. Une bande d’esclaves issus de tribus différentes, n’ayant pas de langue commune, se sont forgés un système linguistique (le créole). Arrivés sur la colonie, on essayait tout de même de les diviser en les catégorisant. Esclaves à talent, esclaves des champs, esclaves domestiques : esclaves quand même. En plus de ça, il y avait les Mulâtres, ces bâtards qui s’étaient considérés supérieurs aux Noirs. L’union des Noirs et des Mulâtres a permis au pays de se débarrasser du joug commun. Quoique ne défendant pas les mêmes intérêts, le mal a été écarté. Finalement, le Fondateur de la Nation, Dessalines, sera assassiné pour des titres de propriétés fonciers. Aujourd’hui encore, règne la théorie de la méfiance, de la peur.

« Nèg an wo pa vle wè nèg anba, moun nan Nò pa vle wè moun nan Sid« .
(Les gens de la bourgeoise se méfient de ceux de la masse populaire, les gens du Nord détestent ceux du Sud)

Le vaudou qui a été à l’origine de la cérémonie du Bois-Caïman, cérémonie qui a décatégorisé les esclaves et montré aux « biens meubles » qu’ils pouvaient se libérer de l’oppresseur.

Aujourd’hui, le vaudouisant est l’homme à abattre, à ostraciser. Sa religion est responsable de tous nos maux, dit-on.

Le peuple a de la méfiance à en revendre. Ce « mercantilisme religieux » établi en Haïti qui nous prêche que la vieille dame du voisinage est le « loup-garou » qui « mange » nos enfants. Le voisin ne veut pas que nous obtenions un visa, un travail, que nous nous marions et ayons des enfants.

Fier ou pas d’être Haïtien?

Je me suis toujours demandé ce que la France aurait fait d’Haïti en 1848 si l’indépendance d’Haïti n’avait pas eu lieu? L’abolition de l’esclavage aurait-elle lieu si tôt? Aurait-il fallu attendre le 20ème siècle comme c’est le cas en Afrique francophone ?

Bien sûr que j’ai honte ! Honte de ces politiques démagogues qui nous dirigent, de ces parlementire qui ne peuvent même pas lire des chiffres romains. Honte de marcher dans les rues sales de la capitale. Évidemment, j’ai honte de ce que je vis dans mon pays.

Quoiqu’il en soit, je suis fier d’être celui que je suis, d’être Haïtien. Je suis fier qu’un roi comme Henri Christophe ait gouverné le pays. Fier quand je vois Raquel Pelissier, Wyclef Jean, Jason Derulo, Duckens Nazon, Carl Jaro, Ralph Leroy, Stella Jean. Toutes ces personnalités publiques qui font flotter le drapeau haïtien à travers le monde comme pour dire que nous sommes un peuple.

 Trop fier de ces paysans qu’on appelle « nègre morne » (rustre) qui bêchent joyeux. Incultes pour la plupart, ils sont aussi courtois qu’un petit garçon instruit. Ainsi, ils nous rappellent que nous sommes condamnés à vivre ensemble. Une tasse de café échangée, un plat chaud partagé ! Voilà ce dont je suis fier ! « L’union ferait la force ».