Garens Jean-Louis

Donald Guerrier sous les projecteurs de l’Europe

Le Qarabağ FK, c’est la grande première de La ligue des Champions. En effet, le club azerbaïdjanais a gagné sa première participation à la phase de groupes de la Ligue des champions en match de barrages. Les champions d’Azerbaïdjan ont été présents en phase de groupes de l’UEFA Europa League ces trois dernières saisons. Du fait de porter en son sein l’international haïtien Donald Guerrier, les Bleus et Blancs se font connaître chez nous. Un billet pour retracer le parcours du chouchou de la sélection nationale.

Donald Guerrier, joueur du Qarabağ FK
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Naissance et débuts de Donald Guerrier

Wilde-Donald Guerrier est né le  à Port-à-Piment dans le sud d’Haïti. C’est dans cette région qu’il débute sa carrière professionnelle avec l’América des Cayes saisons 2011-2013 en championnat national de première division.

Le samedi 8 juin 2013, les Grenadiers  (Surnom attribué à la sélection nationale d’Haïti) ont affronté la Roja de Iker Casillas à Miami lors d’un match amical. Match qui s’est soldé sur une défaite des Grenadiers 2-1. Au cours de cette rencontre, Donald Guerrier a marqué d’une superbe action personnelle la défense de la Roja (75e).

Durant le mercato estival 2013, Donald Guerrier rejoint le club polonais du Wisła Cracovie où il signe un contrat d’un an. En mai 2014, il prolonge son contrat avec le club polonais jusqu’en 2018. Par ailleurs, ses performances dans l’Ekstraklasa font de lui le joueur noir le plus prolifique de l’histoire de son club. De plus, Donald Guerrier a été considéré comme l’un des joueurs préférés des supporteurs locaux.

« La dernière fois, j’ai été distingué meilleur joueur du club. Une distinction que j’ai obtenue en raison de ma régularité. Vu ce que j’ai déjà accompli, les observateurs me considèrent déjà comme le meilleur joueur noir de l’histoire du club. J’ai souvent dit aux responsables du club et à mes coéquipiers qu’il y a des talents haïtiens qui peuvent encore faire mieux que moi mais qui n’arrivent pas à décrocher des contrats mirobolants en raison du niveau de notre football », a déclaré le dossard 77 du Wisla.

Donald Guerrier dans la cour des grands

En difficulté la saison dernière par rapport à ses problèmes de blessure, Wilde Donald Guerrier a laissé le championnat polonais pour se rendre en Turquie. Il a ainsi rejoint l’Alanyaspor en Süper Lig en juillet 2016. Puis, le 5 juillet 2017, le feu follet haïtien a passé sa visite médicale au Qarabağ FK. Pour son premier match avec son nouveau club,  il marque un des cinq buts contre Samtredia en match aller comptant pour le 2e tour des barrages de la Ligue des Champions.

Entre nous, on sait que le Qarabağ FK s’est retrouvé dans le groupe de la mort. En fait, c’est la proie la plus prenable face aux géants européens. Néanmoins, rien qu’à imaginer Donald Guerrier fouler le Stamford Bridge, le Wanda Metropolitano, le Stadio Olimpico procure une certaine fierté. L’international haïtien de 28 ans et son club actuel devront affronter le Chelsea, l’AS Roma et l’Atlético de Madrid. En effet, DG77 en est à sa première participation à la phase de groupes de la plus prestigieuse coupe européenne de clubs. Pour son premier match de groupes, les bleus et blancs ont subi une raclée 6-0. L’ailier cayen a été titulaire face aux poulains de Antonio Conte.

https://www.youtube.com/watch?v=DfHAaMi1PXU

Toutefois, en attendant le reste de la compétition, l’homme à la crête iroquoise et les siens devront s’arranger pour ne pas battre le record de l’équipe ayant encaissé plus de buts dans une phase de poules en Ligue des Champions…


Ma playlist de cet été

Pour moi, une playlist ce sont les chansons que je pourrais écouter à longueur de journée. Tous ces hits qui passent en boucle dans ma tête. Je les fredonne sous la douche ou en marchant.

En principe, je n’ai pas un rythme musical préféré. Autant dire que j’écoute un peu de tout sauf que mes choix musicaux se font en fonction de mes sautes d’humeur. En effet, le soleil ardent des Tropiques est éreintant à cette époque de l’année. En parlant des Tropiques, je me suis toujours considéré comme un afro-caribéen. Si la musique est la langue des émotions, les sonorités linguistiques mêlées au son et au silence me font leur effet.

playlist
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Effectivement, j’ai une affection particulière pour les musiques latines  non seulement  le reggaeton, le bachata, mais aussi le pop latino. Ma mère a des origines amérindiennes (peau cuivrée, cheveux lisses), c’est pour moi la source de cet amour. De plus, l’espagnol est la langue étrangère que je me maîtrise le mieux. A part ça, je danse tout ce qui est du terroir : compas, rara, rabòday… Toutefois, quand je suis d’humeur festive, j’écoute de la techno, de la house music, du dancehall. Puis, quand le besoin d’amour me prend, je choisis le jazz avec des artistes comme Kenny G et Corinne Rae Bailey.

Une playlist « sabor latino »

  • Despacito

Cet été, je continuai de régaler le hit mondial « Despacito ». Ainsi donc, ce méga tube planétaire a permis à bon nombre de découvrir le Porto Rico de Luis Fonsi. Certes, mes tympans n’en sont pas à leur coup d’essai avec cette voix sublime. L’interprète de Llegaste Tu nous a offert du solide sur cette collaboration avec Daddy Yankee. Par ailleurs, les paroles sont aussi fortes que la musique est entraînante.

  •  Ni Tù Ni Yo

Aux jeux de la Francophonie de 2017, Michaëlle Jean,  s’adressant à la jeunesse, a déclaré :« L’art vous assure l’immortalité et la jeunesse ». En effet, je valide à 100%. Un nom me vient à l’esprit : Jennifer Lopez ! L’actrice, la chanteuse, la danseuse : elle m’a hypnotisé depuis l’enfance. J’ai longtemps déifié la beauté des îles. En outre, j’ai toujours considéré l’interprète de Qué hiciste? comme suprahumaine. Du haut de ses 48 ans, la bomba latina mérite sa mention spéciale dans le top 10 des chanteuses les plus sexy du blog Gentleman Moderne. L’amour est-il un tyran? En tout cas, c’est ce que tente de nous expliquer J. Lo sur cette collaboration avec le groupe cubain Gente de Zona. Par conséquent, vous en aurez plein la vue en visionnant le clip : un pare-choc de rêve qui fait monter l’adrénaline…

Une playlist « mizik lakay »

  • Eudomination

Eunide Edouarin, de son nom d’artiste Princess Eud, fait partie des premières rappeuses haïtiennes. En effet, la rappeuse est dans le « game » depuis 17 ans. Car, elle a réussi là où très peu ont vu une lueur de gloire. Néanmoins, elle n’a rien à envier à aucune potentielle concurrente. Peut-être qu’une autre renversera sa domination mais on est loin de ce scénario. Après confirmation de son talent au sein du groupe Mystic 703, sa collaboration avec Ded Kra-Z a porté ses fruits. Ce duo que certains ont assimilé peut-être à tort à une romance artistique a accouché de deux disques, «Limiè wouj » et « Jou pa’m ». Son premier opus en solo « Eudomination » compte une douzaine de titres. Dans « Eudomination », titre éponyme de l’album, la chanteuse scrute son passé via une sorte de rétroviseur de son parcours sur un terrain hyper machiste, le milieu du rap.

  • Dènye won

L’interprète de la chanson “Kite M Kriye” Rutshelle Guillaume est passée de présentation en Haïti. A mon sens, Rutshelle est un talent confirmé. Son deuxième album Rebelle est en quelque sorte une consécration. « Dènye Won », un texte écrit par Pascal Jean Winer, transmet une énergie que la chanteuse partage autour d’elle. Pour créer la provocation, on la voit partager un langoureux baiser avec l’Italo-Péruvien Pier Gramegna dans le clip de la chanson.

  • Work it

« Work It » est une collaboration du chanteur-percussioniste haïtien Shabba avec le groupe Bel Plezi. C’est le vidéoclip le plus hot de l’été. Et quand je dis hot, ça veut dire NSFW (« Not Safe For Work »). C’est aussi l’un des clips les plus tournés sur les chaînes de télévision locales. Vous en aurez plein la vue : une chorégraphie qui déchire, des « twerks », de l’exhibition et des bouffées de « weed », de narguilé . Ceci n’empêche pas cela.

Une playlist Made In USA

  • Wild Thoughts

Rihanna est la seule star dont je ne me lasse jamais. On a environ le même âge.  Alors que certaines vedettes de la chanson qui ont été mes idoles ne m’intéressent plus ou presque aujourd’hui.

Rihanna reste une artiste prolifique. Quoiqu’à mon goût,  ses premiers albums jusqu’à « Talk That Talk » ont eu un plus grand aura. Elle ne cesse de multiplier les collaborations. Il m’arrive d’être méchant avec mes amours. Je n’ai rien contre Riri. Cependant, sa toute dernière collaboration qui m’a vraiment marqué est celle avec Micky Ekko. Récemment, elle nous a livré « Wild Thoughts ». C’est surtout la guitare qui fait tout le charme de la chanson. Sans que le rythme provoque une montée d’adrénaline, la chanson incite-t-elle à avoir des idées cochonnes ?

  • Bon Appétit

Katy Perry ? Qu’est-ce qui vous vient à l’esprit ? Excentrisme ? Militante LGBT ? Sexy girl ? Pour moi, Katy est une vraie machine à tubes. Dès que je pense à elle, je pense à ses clips. Ce n’est pas sans raison qu’elle a récolté des trophées importants. Dans « Bon Appétit », elle nous livre un clip surréaliste comme à son habitude.

C’est surtout une chanson qui s’invite chez vous. Dernièrement, j’ai vu la star du Real Madrid, Marcelo qui s’y régalait avec sa famille dans leur cuisine.

C’est en fait ma prière du midi. La phrase la plus sexy qu’on peut lancer à un (e) collègue qui mange : « Bon appétit, bébé ! » L’été est surtout la période dans l’année où l’on découvre des merveilles musicales qui annoncent des tournées de fin d’année.


Gio Casimir, dans la peau du photographe haïtien

Gio Casimir, de son vrai nom, Jacques Georges Casimir est un jeune photographe haïtien. Né à Port-au-Prince, il voulait être diplomate. Finalement, il préfère photographier pour capturer l’histoire, notamment.

Il a découvert la photographie très tôt, à travers le roman-photo que lisaient sa mère et sa tante… Pour ses 8 ans, Georges a eu son premier appareil compact. Disponible, ordonné et sérieux, ses photos sont aussi bien des commandes que des photos prises à l’occasion d’événements couverts par le grand gars. Rencontre avec cet ami, ô combien passionné ! Jamais sans son fils (son appareil photo).

Dicton : « Photographier, c’est écrire l’histoire »

Lieu de Résidence : Haïti Contact : Facebook & Instagram 

Dans l’intimité de Gio

Gio Casimir se décrit comme « Un homme ordinaire dans un monde à l’envers. » Au fil du temps,  il a acquis certaines valeurs qui lui sont devenues très importantes dans ses relations humaines : intégrité, respect et tolérance, la gratitude. Au cours de son cursus professionnel, il a compris que le plus important était de trouver le juste milieu entre ses activités professionnelles et sa vie privée.

Gio
Photo crédit : Pascal Justafort

Dans sa vie privée, il a des difficultés dans ses relations familiales. Les familles haïtiennes ont tendance à oublier que nous grandissons et que nous développons nos propres ambitions et les plus susceptibles le prennent comme une insulte à leur autorité parentale. Professionnellement, la compétition déloyale de certains ou la mauvaise foi de certains clients est toujours un coup dur pour  lui.

Gio est un véritable « pye poudre » (voyageur). Il a accepté des contrats un peu partout justement pour le plaisir de découvrir d’autres visages et de nouvelles destinations. Le grand gars a passé une longue année à jongler entre la fac et le boulot sans compter les petites escapades hors de Port-au-Prince, en dehors des plans les uns les plus intéressants que les autres qu’il a  prévus.

Entre souvenir et préférences

Les tatouages l’ont toujours fasciné. À 16 ans, on lui a passé un savon monumental parce qu’il racontait à sa mère son désir de se faire tatouer un dragon sur le corps. Ironie du sort à la fin de sa thérapie sur le deuil de sa mère, il s’est  fait tatouer  la date de son décès. Il a aussi tatoué le mot UNBOTHERED qui traduit son état d’esprit depuis quelques années. Gio est à son troisième tatouage. Néanmoins, il ne sait pas encore s’il ne va pas se faire autre chose demain ou dans un mois.

Grand lecteur, il dévore les livres. S’il devait choisir un seul livre, ce serait « La voyageuse de nuit » qui est l’histoire d’une mère en agonie. C’est lorsqu’il s’est  retrouvé à son tour dans la même situation qu’il a mieux compris certains passages et qu’il se les est approprié. Comme auteur, sans réfléchir, il dira Yanick Lahens qu’il a découvert assez tôt dans « La Petite Corruption » et « Dans la maison du père ». Yanick a les mots qu’il faut et elle sait comment jongler avec eux, selon lui. Il a lu presque tout ce qu’elle a écrit et il n’est pas encore sorti déçu d’une lecture.

Gio, la photographie, c’est ta vie

S’il y a un truc qu’il  regrette c’est de ne pas avoir l’occasion de prendre sa famille en photo aussi souvent qu’il voudrait. Très tôt, il a développé la manie de prendre en photo ses cousins et cousines.

Il a travaillé avec des modèles exceptionnels comme Jean Woolmay Denson Pierre et Jonathan Cancoul. Au début de sa carrière, il voulait surtout faire de la photographie de mode. Du coup, il s’est tourné vers des visages atypiques. Il est ainsi tombé sur Woolmay. Avec lui, le courant est passé assez vite et il est resté jusqu’à son départ  l’égérie de la maison. À travers lui, il a découvert d’autres jeunes mannequins. Avec Jonathan, les débuts étaient différents parce qu’il était plus intéressé à la photographie qu’au modeling. C’est après la première séance qu’il a compris qu’il avait vraiment le potentiel pour être devant la caméra. Aujourd’hui, il est surtout motivé par ce qui sort de l’ordinaire même s’il doit choquer parfois.

Gio
Crédit photo : Fotograf Gio
Gio
Crédit Photo : Fotograf Gio

Par contre, j’ose dire qu’il est un photographe à fantasmes. Gio veut aider les gens à repenser leur nudité. Il est d’accord que c’est bien de cacher sa nudité sous les vêtements. Mais, c’est aussi socialement correcte  en même temps car la nudité n’a rien de laid ou sale.

Ses projets

Là maintenant,  il est sur deux projets majeurs, la préparation de son documentaire sur la vie d’Esther Boucicault et sa collaboration à la rubrique Intimi’thé du blog Publicad’Elles. En dehors de tout ça, il travaille aussi sur les brouillons de textes pour son blog Mon Grain de Sel.

Entre-temps, Gio doit aussi mettre en place les clichés pour une probable exposition photo prévue pour la fin de l’année. Sinon, il laisse faire le temps et les opportunités qui viennent souvent quand il s’y attend le moins. Il se dit ouvert à la vie et à ce qu’elle offre.

Actuellement, il est étudiant en Histoire de l’art et archéologie à l’Université d’État d’Haïti. Entre-temps, il continue de s’adonner à sa passion première. Dans l’immédiat, il veut surtout garder de bonnes notes et continuer à apprendre. L’histoire de l’art est un de ces rêves d’ado qu’il réalise. Il pense qu’à l’époque où il a découvert cette discipline à l’Ecole Nationale des Arts c’était la seule entité à dispenser ce cours.

Quand on grandissait le métier de photographe n’était pas ce qu’un parent souhaiterait pour son fils. Gio peut dire qu’il est chanceux puisque sa mère est la première à lui pousser à suivre un cursus professionnel s’il voulait vraiment se lancer dans la photographie. De surcroit, son père a rapidement suivi mais a toujours insisté pour qu’il fasse des études plus longues. Il croit que du moment que le photographe fasse bien son travail, qu’il ait de la rigueur. Le photographe peut vivre de la photographie en Haïti. La reconnaissance et l’argent ne viennent pas immédiatement mais une fois que tu fais tes preuves l’une et l’autre suivent. Il estime qu’ils sont nombreux à ne vivre que de la photographie.


Folie quand tu me prends

Nous sommes tous un peu fou ! À différents degrés et de différentes manières mais chacun cultive sa folie avec soin.

J’ai commencé à « travailler » dès l’âge de 20 ans. Un an après mon baccalauréat, j’allais bosser le matin et en après-midi j’allais en cours. J’ai commencé une étude en administration grâce à une dite bourse. Quand j’ai remarqué que le standard et le nombre d’heures de cours ne correspondaient pas, j’ai laissé tomber.

Entre-temps, j’ai trimé quelques boulots. Certaines fois, j’ai dû abandonner ma paye à des scélérates qui se faisaient prier pour me rendre mon dû. Puisqu’il faut une connaissance avancée pour avoir une chance de survie dans le système, j’ai tenté d’entrer à la seule université publique du pays. Entre autre, mon père m’offrait seulement le logement.

Finalement, quand j’ai eu l’illusion d’avoir trouvé l’emploi de ma vie au sein d’une des plus prestigieuses entreprises du pays, j’ai failli compromettre mes chances.

folie
Android Photography

Folie, aime-moi

Pour ceux qui me connaissent bien, ils savent que le maître-mot pour me définir est FOLIE. En fait, c’est mon grain de folie qui donne du sens à ma vie. Aussi spontané et imprévisible que je sois, les décisions irréfléchies sont le moteur de ma vie. Celles que je regrette et celles que je regrette de ne pas avoir prises.

Après environ un an passé au sein de la dite entreprise, j’ai décidé de changer de boulot. Oups ! Rembobinons ! Peu après avoir trouvé ce boulot, mon père m’a demandé de plier mes bagages. Entre nous, l’éponge brûlait bien avant. En plus de mes dépenses habituelles, il fallait que je paye le loyer. Pourtant, j’ai décidé de laisser le boulot pour reprendre mes études à la fac. Rire ! Comme quoi ma folie n’a pas de limite.

Quand j’ai dit à un ami qu’il me faut un boulot, il m’a demandé si mon job ne me plaisait plus. Des amis bien intentionnés s’inquiètent pour moi. Ils craignent qu’un chômage prolongé fasse de moi un SDF. Ben ! Que dire de plus ! Déjà j’ai l’impression que tout le monde est au chômage dans mon pays. On n’oserait pas demander à quelqu’un combien est-ce qu’il gagne. Mais, puisque mieux vaut peu que rien, certains se résignent. Ils sont dans un chômage déguisé. On travaille pour payer des dettes.

Des collègues  ont estimé que j’étais fou d’avoir abandonné la fac pour accepter le job. Dorénavant, des parents et amis vont me considérer encore plus fou d’avoir démissionné.

J’ai assez d’économies pour payer mon bail et couvrir deux à trois mois de chômage. Comme tout autre jeune du pays, il m’arrive de me sentir découragé. Par contre, j’ai ma philosophie de vie. Laisser partir ce qui s’en va et venir ce qui vient.


Mariage pour tous en Haïti : qui dit quoi ?

Le mariage pour tous en Haïti est un sujet qui alimente les débats depuis quelques temps déjà. Cette semaine encore, la proposition de loi votée par le Sénat haïtien vient verser de l’huile sur le feu. Haïti figurait déjà parmi les pays totalement homophobes sur la carte du monde selon le site Gayvoyageur. Sans grande surprise, le vote de la proposition de loi contre le mariage pour tous est venu confirmer la rumeur. Ce mardi, quatorze sénateurs ont voté contre le mariage pour tous avec une seule voix « pour » et une abstention.

La loi, qui comporte sept articles, punit, entre autres, « toute tentative de célébration d’un mariage entre deux personnes de même sexe, tout acquiescement à un tel acte ». « Toute promotion, sous quelque forme et par quelque moyen que ce soit, constitue un délit d’outrage aux bonnes mœurs et à la pudeur publique », peut-on lire en son article 3. Rien d’étonnant !

Un Parlement qui se leurre sur le genre

Au Parlement haïtien, la parole appartient aux plus éloquents. Dois-je plutôt dire que les tonneaux vides font plus  de bruit ? Avez-vous déjà gaspillé un temps fou à suivre une séance parlementaire ? Vous ne verrez que des grandiloquents qui s’amusent à corriger les fautes de diction de leurs collègues. Des engueulades, de grands aboiements pour prendre la parole sans que le président de la séance ne puisse contrôler le débat certaines fois. Ceux qui ne savent pas quel déterminant requiert un substantif courant n’ont pas la voix au chapitre. Passer des heures à déblatérer sur les nuances de sens dans un texte en français, c’est cela, être sénateur en Haïti.

Sur le plan local, la presse se demande s’il n’y aurait pas de lois plus utiles qui mériteraient d’être votées. En outre, les associations LBGT dénoncent un attentat contre leur communauté et parlent d’homophobie d’État. Ailleurs, les médias internationaux en parlent.

Jean Renel Sénatus, le prochain Ramzam Kadyrov haïtien ?

Jean Renel Sénatus est passé de présentation en ce qui concerne l’homophobie en Haïti. En fait, il accroît son capital politique sur le dos des “masisi” et des “madivin”. De député à sénateur, il n’a eu qu’un seul cheval de bataille : protéger la famille. Et si son intention politique était de gravir à la magistrature suprême ? Véritable fer de lance dans la persécution homophobe en Haïti, Me Sénatus doublé de son bourreau adventiste Carl Murat Cantave. Ce dernier avait fièrement déclaré sur les ondes d’une radio locale avoir giflé son collègue d’alors, Steven Benoît qui, dit-il, avait une dent contre lui pour sa position.

J’imagine une Haïti avec Jean Renel Senatus à la tête de la République. Nous aurions une police des mœurs pour exécuter les homosexuels. Ce sera comme au temps des croisades. La Bible ou la mort ?

Mariage Pour tous
Dukesn

La Bible Pour Les Nuls

A tous ces parle-menteurs qui vocifèrent en pleine assemblée qu’ils sont chrétiens. Ceux-là qui sont prêts à jurer par le Christ, je leur dis qu’ils ne sont pas les seuls à connaître la Bible. Même le Diable la connaît et est prêt à l’appliquer à son intérêt. Puisqu’il y a une loi sur la diffamation, je ne vais pas leur dire que je les nique grave. Je me demande si au temps du Christ il n’a pas eu des homosexuels. Pourquoi ne les a-t-il pas envoyer tout droit en enfer? J’aime bien ce proverbe haïtien : « Di Dyab bonjou l’ap manje w ». Autant l’appliquer pour le Dieu de la Bible s’il en est ainsi. Chez nous, quand quelqu’un veut te baiser (dépouiller ou arnaquer), il brandit sa bible et te sort des versets qui ne tiennent pas compte de la cohérence totale des 66 petits livres.

Le Mariage Pour Tous aurait bien pu avoir lieu

Mariage Pour Tous
Corund / Pixabay

Depuis qu’il était bruit que le mariage pour tous était légalisé en France, il y a eu cette obsession que cela arrive chez nous. Bon nombre de chasseurs de tête (chefs religieux, politiques) se sont armés de leur croix pour exorciser les homosexuels.

Puisque bientôt ce sera « Au nom de la loi je vous arrête », les LGBT haïtiens vont devoir s’organiser plus secrètement. Sinon, ils risquent de voir des individus défoncer leurs portes ou subir un lynchage public sous les regards approbateurs de la police.

Je me demande si le mariage gay a toujours été l’intention de la majorité de cette minorité sexuelle du pays. Ici, ça a toujours été « Pour être heureux, vivons cachés ». J’ose dire que si notre société civile et les LGBT qui en sont en son sein l’avait voulu, le mariage gay aurait été légalisé en Haïti.  Ne dit-on pas qui finance commande? Comme toute autre fois, une somme faramineuse aurait été versée et la loi serait votée. Point barre. Ne suis-je pas aussi un nègre du pays? Entre nous, messieurs, désamorçons la polémique…

(*) Masisi : gay en créole haïtien.

(*) madivin : lesbienne en créole haïtien.

 


«Les Amants de Couleur» de Carl Jaro

Les Amants de Couleur, premier film homosexuel haïtien du réalisateur franco-haïtien, Carl Jaro. En fait, ce film est le résultat des rencontres du réalisateur. Lui qui a longtemps fréquenté la communauté afro-caribéenne. C’est durant cette période qu’il s’est rendu compte que les Antillais, les Africains et les Maghrébins avaient des idées préconçues sur les homosexuels. Il a tout de suite senti qu’il y avait une histoire à raconter.

Si l’homosexualité féminine est un grand fantasme chez la gent masculine, on ne saurait imaginer l’inverse chez les femmes. Déjà, il faudrait qu’il existe une grande complicité dans le couple pour que la femme accepte de partager son homme avec une autre. Qui plus est, il est inconcevable pour une femme de partager son homme avec un mâle. Tout à fait logique ! A ce jeu de rôles, l’un demandera plus d’attention que l’autre.

Dans son film Les Amants de Couleur, Carl Jaro nous décrit une scène pareille. Yann (Matthieu Gabriel) est amoureux d’Aman (Carl Jaro), ils vivent une une belle aventure entre hommes. Mais cette idylle va être dérangée par une femme qui veut contraindre Yann à une relation hétérosexuelle. Un trouble entre les deux amants homosexuels et une vie amoureuse déchirée pour Yann, qui souffre des préjugés et de l’homophobie de cette intrigante. Quand Gabie (Kethie Georges) découvre qu’Aman partage la vie de Yann la veille de ses noces, pas question de lâcher prise à ce point de non-retour. Jusqu’où la panthère noire serait-elle prête à aller pour marquer son territoire ? Comme on dit souvent, la raison du plus fort est-elle toujours la meilleure ?

Les Amants de Couleur est un film inspiré d’une histoire vraie. C’est en 2013, trois ans après l’histoire tragique de son ami Jean-Charles Chadet que Carl Jaro se lance dans ce projet de film court qu’il titre « Les Amants de Couleur ». L’idée : « Mettre en lumière cette histoire amoureuse et interdite gravée dans ma mémoire », insiste le jeune comédien haïtien, les yeux mouillés quand il se souvient de la bataille du jeune martiniquais de 35 ans. Tiraillé entre un amour de façade pour « sauver les apparences » et un amour vrai mais caché, Jean-Charles Chadet, un jeune antillais angoissé et torturé affectivement met tragiquement fin à sa vie. Avec ce film, Carl espère participer au changement des idées. Selon ses propos, recueillis par Grégory Ardois-Remaud pour Queek.fr, « l’homophobie tue, l’amour nous rassemble »… Si seulement, on pouvait s’aimer quelle que soit notre religion, notre couleur…

 

Les Amants de Couleur
Crédit photo : Daniel Nassoy

Sorti le 30 octobre 2016 en avant-première en banlieue parisienne, le film est désormais disponible en ligne. Je vais voir le nombre de vues que le film récoltera sur Youtube. Comme sur Facebook, les « haters » iront visionner le film pour ensuite déposer leurs commentaires. Rires ! J’ai moi-même lu toutes sortes d’âneries et d’invectives sur la page fan du film.

En réalisant ce film, Carl Jaro a risqué la peau de ses fesses. Des menaces de mort proférées sur Facebook et provenant de la Jamaïque. Avec toute cette vague d’homophobie dans son pays natal, le petit Prince d’Haïti est loin de rentrer au bercail. On lui reproche de faire venir la culture du « blanc », vu qu’il vit en France. Aujourd’hui, on l’interdit même de mettre le pied dans son pays. Chez nous, l’homosexualité est la maladie du petit blanc pervers. L’homme noir c’est le mâle viril muni de son braquemart prêt à défoncer la femme blanche. Puisqu’on en parle comme d’une maladie mentale, le sujet homosexuel se retrouve dans une situation névrotique. Dès lors, il établit son mécanisme de défense : projection, déni, refoulement, introjection, transfert.

Les Amants de Couleur, un film qui dit tout

Réalisateur du film Les Amants de Couleur
Photo: Daniel Nassoy

L’homosexualité est encore si tabou, que certains homosexuels préfèrent dissimuler leur orientation sexuelle en se mariant plutôt que d’assumer leur sexualité. En effet ! L’objectif est de dénoncer les tabous liés à l’homosexualité masculine et de combattre l’ignorance autour de cette question. Son combat est loin d’être gagné. Mais, ambitieux et déterminé comme il est, il continuera d’être le porte-voix des homosexuels.

 

Pour conclure, Carl Jaro touche un problème aigu au sein de la communauté LGBT : la question du suicide. Selon Inter-LGBT, « les personnes lesbiennes, gaies, bi et trans se suicident en moyenne 4 fois plus que le reste de la population ». Citons l’exemple d’Anderson Estinphil. Ce jeune haïtien de 22 ans, étudiant en biologie médicale. Il est gay. Il a quitté Nazon, son quartier, suite à de fortes menaces verbales. Un déménagement forcé après l’annonce en septembre 2016 du festival MassiMadi. Et depuis lors, Anderson, connu sous le nom de « Etera », vit ici, chez son ami, gay lui aussi. Efféminé depuis son enfance, « Etera » avoue n’être jamais attiré que par des hommes.

En 2010, il a tenté de se suicider à 2 reprises à cause de critiques acerbes contre les LGBTI. Selon lui, l’homosexualité n’est pas une maladie comme on veut le faire croire, c’est plutôt l’homophobie qui en est une. « Mon orientation sexuelle ne dérange en rien ma foi chrétienne, mais on a tendance à m’écarter de toutes les activités de l’Eglise ». 

Quoique le suicide ne soit pas une pratique courante en Haïti, ils sont quelques « Aman».

Retrouvez l’intégralité du film :


Jeunesse haïtienne: Quel espoir, quel avenir

Haïti fait partie des pays dont le pourcentage de population de moins de 15 ans est moyen. De mon temps, on disait « Pitit se byen pòv malerèz ». Les parents très pauvres comptent sur leurs enfants, une fois devenus vieux, pour les soutenir. Cependant, cette mentalité a évolué. Désormais, certains parents comprennent qu’il faudrait mieux nourrir, soigner et éduquer leurs progénitures. De plus en plus de mères pratiquent le planning familial. Néanmoins, n’empêche que 30% de la population soit encore des ados. Dès lors, on se questionne sur cette génération qui, elle-même, se cherche.

Je suis encore jeune, jeune adulte. Avant 2010, j’étais encore adolescent. je me rappelle d’une parole de chanson d’un des groupes hip-hop les plus adulés du pays. « Granmoun yo echwe ». (Les adultes ont échoué). Dire que ces messieurs approchent la quarantaine. Cette parole a déchaîné une telle polémique. Pourquoi ces mots?

Pour mieux vous répondre, rendons-nous dans une frange récente de l’histoire d’Haïti. Ces messieurs étaient déjà nés le 7 Février 1986. Cette date marque la fin d’une ère : l’ère duvaliériste. Les Duvalier sont les pires dictateurs  qu’aient connu Haïti. Ben. Si vous voulez en savoir plus, lisez Bernard Diederich.

La fin d’une ère devrait marquer la venue d’une nouvelle. Trente ans après la chute duvalérienne, la classe politique haïtienne a piteusement échoué. Ici, le nombre de jeunes à nourrir, éduquer et soigner est si élevé que l’État n’arrive pas à subvenir à leurs besoins. J’espère avoir éclairé vos lanternes et ceux de nos compatriotes feignent de ne pas savoir de quel échec il s’agit.

Souvent, les « granmoun » (génération X) reprochent aux jeunes (Gen YZ) d’être des délinquants pour la plupart. Et pourquoi donc? Parce que notre génération connait le rap. Le hip-hop haïtien a pris dans les années 90. Comme si chaque génération n’a pas connu sa mouvance sociale. On dirait parfois qu’on nous considère comme une génération en déperdition.

La jeunesse actuelle est plus que jamais connectée à ses idoles : potins, looks, slogans. On lui reproche de ne pas avoir de bons modèles. Récemment, le Ministère du Tourisme d’Haïti a impliqué quelques jeunes artistes haïtiens influents à la sensibilisation de la population à l’importance du tourisme. Voir leurs idoles impliqués dans une telle initiative pourrait aider la jeunesse du pays à briser les stéréotypes…

Une jeunesse qui se cherche

On a tous nos raisons. J’ai arrêté la fac parce que je n’avais pas le choix. Ce mois-ci, j’ai appris avec stupeur une nouvelle décevante. Le plus brillant étudiant de ma promotion de fac a stoppé ses études en linguistique. J’en crois pas à mes oreilles. Je le voyais obtenir son PhD. Pour reprendre ses mots que l’on dit trop souvent chez nous, peyi a pa ofri moun anyen. (Le pays n’offre aucun avantage social). Si partir loin du pays était une évidence, aujourd’hui ce périple devient une impérative. Le Chili, pays hôte, devient le nouvel eldorado des jeunes haïtiens.

D’un autre côté, une partie de la jeunesse actuelle croit dans son dynamisme et sa qualification. Une jeunesse compétente qui se veut au cœur des décisions, au cœur de l’action. En ce qui me concerne, je pense qu’il serait probable de combler tout fossé générationnel. Comme dit, le vieil adage, « Si jeunesse savait, si vieillesse pouvait« . Tout ça pour dire quand on est jeune, on manque bien entendu d’expérience et de vécu; et dans nos vieux jours, on possède l’expérience mais plus la vigueur de sa jeunesse.

Une autre Haïti est-elle possible avec sa jeunesse?

Si de jeunes oisifs passent leurs journées à ne rien faire, à s’adonner à la bouteille, une autre partie pense autrement. Du coup, certains jeunes de la génération consciente se demandent combien d’entre eux croient qu’il est possible de remettre Haïti sur la voie du progrès socio-économique. Effectivement, si certains se plaignent du mal du pays, d’autres préfèrent prendre l’initiative. En fait, depuis quelques temps, on voit bourgeonner un esprit d’entrepreneuriat en Haïti.

En 2014, de concert avec des institutions partenaires dont l’OIF et l’Université d’État d’Haïti, le comité organisateur du groupe Echo Haïti, a procédé au lancement de la première édition du premier forum international de jeunes entrepreneurs  en Haïti, baptisé « Elan Haïti 2014 ». Ce forum biennal international a connu une deuxième édition en 2016. De cette dernière édition est née un projet innovant axé sur l’emploi PUSH qui entend s’attaquer à la problématique d’insertion des jeunes diplômés sur le marché du travail. L’objectif, dans la durée, est d’aider des jeunes professionnels haïtiens à s’insérer sur le marché de l’emploi et agir ainsi contre le chômage des jeunes. Récemment, l’économiste Marc Alain Boucicault, fondateur de la société Banj, a annoncé que le lancement officiel de cette institution aurait lieu le mardi 1er août 2017 : un nouvel outil dans le monde entrepreneurial en Haïti.

Haïti : Je m’engage

C’est un peu triste à dire ! Mais, parfois on ne saurait empêcher un jeune de partir quand on ne peut l’offrir le meilleur. Le pire, c’est quand les jeunes jurent de ne plus revenir. Franchement, on les comprend. Souvent, de retour au pays, ils sont la cible potentielle de voleurs depuis l’aéroport. Cependant, on craint que la jeunesse qui constitue la couche arable de notre pays soit déversée vers l’extérieur. Si l’on ne peut encore guérir le mal, rien ne nous empêche de le prévenir. Nous sommes nombreux à nous engager à notre manière. Professeurs, artistes, jeunes leaders… sauf les politiques peut-être.


Le français en Haïti, un stigmate du passé colonial

Le français, langue seconde en Haïti, est utilisé dans l’administration, l’enseignement et dans la presse. Le français est apprise à l’école. Même après le bac, ceux qui maîtrisent parfaitement la langue de Voltaire sont peu nombreux. Seulement 10% d’Haïtiens parlent vraiment le français. Contrairement à l’Africain, l’Haïtien qui s’exprime en une langue étrangère fera tout pour articuler comme un natif. Du moins qu’il peut si j’ose dire. Vous comprendrez donc pourquoi nos pères conscrits se couvrent de ridicule en commettant un lapsus linguæ. C’est devenu la grande mode chez d’ignares parlementaires haïtiens. De quoi pisser dans sa culotte.

Ici, le français est la langue de prestige social au détriment du créole. Dès lors, on se pose la question : Le français menace-t-il le créole? Une prise de parole en public en langue française peut mettre mal à l’aise un Haïtien. Et pourquoi donc? Parce qu’ils ont peur de commettre des erreurs. Alors, soit que vous soyez aux abonnés absents, soit que vous préparez votre discours, pas facile d’improviser en français. Toujours est-il que le français ne peut clouer le bec à nous tous. 😜

Au XIXe et jusqu’au début du XXe siècle, l’intelligentsia haïtienne envoyait ses enfants au Berceau du Savoir. Tout cela est révolu. Aujourd’hui, les quelques liens culturels qui semblent nous lier à la France sont une histoire et une langue commune. En 2015, la visite officielle de M. Hollande à Haïti devait aussi établir les bases d’une coopération franco-haïtienne ambitieuse et durable… Tout cela parce que les temps ont changé. L’usage de l’anglais se révèle aujourd’hui provocateur pour l’épanouissement du français en Haïti.

Le français
© Christian Packeniu

Depuis 1970, Haïti adhère en tant que membre de la Francophonie. Le XVe Sommet de la Francophonie a été un peu singulier. Le Forum économique de la Francophonie chérissait de faire de la francophonie une véritable communauté économique. L’élection de Madame Michaëlle Jean au poste de Secrétaire Générale de la Francophonie avait emballé bon nombre d’Haïtiens comme si elle allait représenter Haïti. Il est évident que si la Francophonie fait un grand pas vers le progrès économique, Haïti fera un petit pas. Toutefois, là n’est pas mon combat.

Est-ce que le français menacerait le créole?

Le Dr. Pradel Pompilus, l’un des pionniers de la créolistique, a écrit en 1973 dans l’avant-propos de son ouvrage Contribution à l’étude comparée du créole et du français à partir du créole haïtien : «Le français n’est pas notre langue maternelle; la langue de notre vie affective, la langue de notre vie profonde, la langue de notre vie pratique, pour la plupart d’entre nous du moins, c’est le créole, idiome à la fois très proche et très éloigné du français.»

Qui a honte de sa langue a honte de lui-même. À noter que la plupart des Haïtiens sont des néo-colonisés et disent que le créole  n’est pas une langue. Ne dit-on pas que la langue véhicule l’expérience socio-culturelle? Car, elle nous permet de nous intéresser à la pensée et au comportement des sujets parlants! Dès sa rentrée à l’école l’Haïtien est forcé d’oublier, de négliger ou de renier sa langue maternelle. Néanmoins, l’Akademi Kreyòl Ayisyen ferait la plaidoirie pour que pour que les enfants, à l’école, puissent avoir le droit de parler leur langue maternelle sans aucune restriction. Dans les classes moyennes et bourgeoises, les parents s’efforcent à ce que la langue maternelle des enfants soit le français. Je crains que, dans les années à venir, nous ayons une langue qui ne soit ni créole ni français. Le créole serait donc menacé de disparition à plus ou moins long terme.

Repensons l’Haïti francophone de demain

La Sénégalaise Hulo Guillabert s’est rendue compte de bien de vérité sur l’Afrique que nous pouvons appliquer.

«Il faut conduire un grand changement de consciences pour que l’Afrique devienne une terre promise pour ses enfants, au lieu d’être l’enfer qui les oblige à fuir vers d’autres cieux.»

Pour cela, il est important que le système scolaire soit totalement refondé partout dans le continent, surtout en Afrique francophone, où nous sommes tous le fruit d’un système éducatif colonial bien ficelé pour nous aliéner gravement. Ce système est en crise partout dans cet espace», a-t-elle soutenu.

Dr Pradel Pompilus, dans son fameux ouvrage « Le problème linguistique haïtien », 1985, Ed. Fardin, a fait un constat similaire au chapitre III intitulé La langue française en Haïti.

Le français «s’est maintenu grâce à nos écoles surtout, qui ont toujours compté dans le cadre de leurs professeurs des enseignants français».

culture française
© Calua

Je trouve intéressant le cas d’Algérie. La langue d’instruction du système éducatif algérien est l’arabe standard qui existe exclusivement en situation d’apprentissage. Néanmoins, la récente réforme du système éducatif (2003) met l’accent sur l’enseignement précoce du français dès la troisième année primaire (CE2). En Haïti, notre société n’est pas plurilingue et multiculturelle comme c’est le cas de l’Algérie.

Aménagement ou déménagement linguistique?

Dans son livre « Yon lekòl tèt anba nan yon peyi tèt anba », l’éminent linguiste haïtien Yves Déjean a évoqué la situation de l’école haïtienne dans un pays mal organisé. Encore selon le nonagénaire, « sur chaque 100 élèves qui entrent en 1ère année fondamentale, seulement 8 d’entre eux ont atteint la classe de philo. » L’aptitude à comprendre et à produire en français témoigne de ce grand parcours du combattant. Comme il est si bien proposé ici, il faut une politique éducative cohérente en Haïti.

Le français
Crédit photo : NAVFAC

Nier le fait français en Haïti –au nom d’une ‘’exemplaire’’ défense du créole–, constitue à l’évidence une scotomisation, pour citer le linguiste-terminologue Robert Berrouët-OriolCela servira-t-il à grand chose d’annuler la langue française au bénéfice du créole? Pas vraiment ! Pour reprendre Michaëlle Jean : « Le français nous permet de parler au reste du monde ». Qui va prendre du temps pour produire des informations scientifiques et philosophiques pour un petit groupe uniquement créolophone?

Dès lors, la mise en oeuvre de politiques linguistiques pour une révolution culturelle est plus que nécessaire. Pour citer le linguiste français Louis-Jean Calvet (1999), par politique linguistique, on entend «l’ensemble des choix conscients effectués dans le domaine des rapports entre langue et vie sociale, et plus particulièrement entre langue et vie nationale.»

Selon Pierre Vernet, de regretté mémoire, le pays ne verra pas le changement tant souhaité sans une modification profonde de « notre système de pensée, à l’origine de nos actions et de nos comportements ».

Le français reste la langue dominante socialement, celle qui donne accès à la mobilité sociale. Pourtant, le français n’est ni parlée, ni comprise par l’immense majorité des locuteurs haïtiens.

Pour conclure, je ne saurais prôner le bannissement du français pour donner droit de cité au créole. Mais, un aménagement en même temps des deux langues officielles d’Haïti.


#Mondochallenge : Internet, mon mal nécessaire dans un monde effréné

« Si Internet n’existait, il aurait fallu l’inventer ».

Depuis l’avènement du réseau informatique mondial, la vie de l’homme n’est plus le même. Par exemple, notre façon de communiquer a changé. Au lieu de passer de longues heures au téléphone, un jeune gardera le contact sur Facebook en temps réel. Pourquoi faire tout ce déplacement en entreprise quand on peut lancer une vidéoconférence? Parfois, je me préoccupe du sort des photographes en studio tellement qu’il est facile de se prendre en photo et de les partager… De nouveaux métiers ont été créés comme les métiers de l’Internet : webmaster, développeur web, chef de projet multimédia, webdesigners, intégrateur html… Le monde devient un village. Point n’est besoin d’attendre des jours pour recevoir son courrier, l’accès à l’information s’obtient en un clic.

Il y a presqu’un demi-siècle naissait (presque) Internet. J’ai découvert Internet en 2004. À l’époque, les seuls réseaux sociaux les plus populaires étaient Hi5 et Badoo. J’allais tomber en amour avec le site web d’hébergement de vidéos créé le 14 février 2005, Youtube. Il fallait utiliser un ordinateur de bureau pour jouer à Miniclip (abattre Ben Laden). Les nouvelles technologies ont évolué à une vitesse fulgurante que j’en suis moi-même étonné.

J’ose dire que je suis un  « digital native »  c’est-à-dire j’appartiens à la génération Y. Premièrement, j’ai connu la cassette, le CD tout comme j’ai appris à utiliser SoundCloud. Deuxièmement, j’ai appris à chercher dans l’annuaire téléphonique tout comme je maîtrise Facebook pour chercher un contact. Au final, je peux aller voir les gens, les téléphoner tout comme leur envoyer des mails (s’ils y ont accès). Tout ça pour vous dire que j’ai appris jeune à vivre parmi les médias envahissants.

Internet

    Crédit photo : Geralt / Pixabay

 

Vivre avec ou sans Internet?

On a déjà lancé des journées sans connexion, des journées sans téléphone portable auxquelles je n’ai pas encore participé. Passer une journée sans vérifier mes e-mails, ma page Facebook. Cela ne m’avait pas effleuré l’esprit. Pourrais-je me passer d’Internet aujourd’hui? Il est vrai que l’habitude est une seconde nature. Ça se peut tout comme on peut vivre sans électricité. Internet me donne plus d’ouverture sur le monde. Mais, s’il n’existait pas, je pourrais bien vivre sans.

Il y a de cela quelques années, le monde vivait très bien sans Internet. Pour trouver une information, on cherchait dans les dicos, dans les encyclopédies. Aujourd’hui, il suffit de googleliser. De toute l’histoire de l’humanité, l’information n’a jamais été aussi accessible.

À l’école, les professeurs envoient les élèves effectuer des recherches sur Internet. Pour vous acheter un billet d’avion ou avoir accès à vos comptes bancaires, il vous suffit de quelques clics. On économise du temps et de l’argent. Force est de reconnaître qu’Internet est nécessaire à nos vies actuelles.

S’adapter aux nouvelles réalités de l’Internet

Conscient des dangers du Net, un grand nombre de parents contrôle l’utilisation qu’en fait leurs enfants. S’initier à Internet fait à présent partie de l’éducation. La pornographie devient « normale » et plus que jamais accessible.

Sur le plan humain, les parents exposent trop tôt leurs enfants à Internet. On a l’impression que nous nous préoccupons plus des likes que ceux qui nous entourent.

L’avènement des nouvelles technologies a donné de nouvelles pistes à la criminalité. On parle de cybercriminalité, de cyberterrorisme. Certains pays ont dû, soit amender leurs systèmes de droit, soit chercher des bases légales dans leurs constitutions, pour faire face à ces nouvelles réalités.

Internet
© Geralt / Pixabay

Certes, ceux de ma génération sont une génération « perdue », « désabusée »… une génération qui cherche sa place dans la société. Précaires, méfiants vis à vis de la politique, nous sommes pourtant mieux éduqués que nos aînés X.

La génération Z est encore plus numérique que la mienne. Cette génération sera probablement aussi bien éduquée si ce n’est plus encore que la génération Y. Et elle devra briser le silence et faire les bons choix…